dimanche 15 novembre 2009

Les "Années 90" au pied du Mur : les nouvelles technologies

Partie 2 : Dis papa, c'était comment la vie privée avant ?

Choqué moi ? Jamais ! Et pourtant...Partager sa vie privée avec les autres est devenu progressivement une habitude, sous la pression des NTIC en plein boom dans les années 90. Cette habitude s'est elle transformée depuis en un plaisir coupable ? A mesure que les NTIC ont intégré nos vies
, la vie privée est du coup devenue l'affaire de tous, mais surtout une bonne affaire pour certains...


Il y a 15 ans de cela, avoir entre les mains et contrôler sa vie privée était possible. Il existait même encore de vieux réflexes pour la protéger. On observait parfois une femme rougir dans le métro après l'avoir un peu trop étalée. Chacun ignorait alors que son compagnon de banquette avait coulé du béton chez Jean-Jean tout le dimanche après-midi et avait « le dos niqué » depuis. Une information anodine, sans danger, et dont tout le monde se passait.

Entre temps il est devenu courant d'en savoir plus sur la vie des autres via les discussions partagées au téléphone dans le métro. Il n'y avait alors qu'un pas à faire pour partager sa vie privée par mail ou SMS. Bien plus riches en informations, ces outils sont aussi bien meilleurs pour le petit shoot d'adrénaline qu'ils procurent en toute légalité. «salut jess, t ok pour ce soir ? cette fois c promi j'assure jusqu'au bout - big kiss».

Bien sûr ce n'est pas comme ça que la société s'est transformée en société de l'information - entendez par de l'information "personnelle" - car les changements de perception de la société vis à vis de la vie privée se sont faits de façon bien plus indolore.


La vieille rengaine à papa

Fin des années 90, apparition des premiers réseaux sociaux. La vie privée commence à s'étaler. N'ayant souvent pas grandi avec cette logique de diffusion ou de protection des contenus privés, ceux qui s'opposent encore à exposer aux yeux de tous leurs photos perso peuvent passer pour des vieux cons. «Allez Michel, on s'en tape c'est rien, c'est juste les photos du week-end à Tijuana, j'm en fous je les mets en ligne quand même». Sans grandes conséquences, ces petits gestes sont devenus progressivement les signes extérieurs d'une société décomplexée sur ses données personnelles.

Moins inoffensifs, les effets secondaires sur le web des photos des nichons d'Océane, 3e B au collège Jean-Pierre François de Rennes, prises dans les vestiaires de la piscine. L'histoire fait bien marrer ses « potes », mais pas seulement. Ils seront finalement très nombreux dans le monde à se rincer l'œil. Avec ce genre de pratiques, la nature des informations qui intéressent une bonne partie des internautes a petit à petit changé. Un nouveau métier apparaît alors : vendeur de données personnelles.
Je tweet donc je suis ?

Les années 90 ont formaté la décennie suivante à cet espionnage technologique et social. Les infos personnelles parviennent désormais aux réseaux sociaux qui les stockent (bien qu'il n'y ait aucune relation évidente entre elles) avec pour objectif de les exploiter à des fins commerciales, "just in case". Que faire à Vézac, la dernière destination pour les vacances ? Avez-vous des envies de week-end ? Quel est l'intérêt des 18-25 ans pour les pompes à scratch vintage ? Si Monsieur Toutlemonde se fout bien de ces informations (ou au mieux s'en amuse), d'autres professionnels des NTIC savent que ces données personnelles ont plus d'importance que le respect de la vie privée d'un internaute lambda.

Les apôtres du capital conversationnel et du branded content sont ravis de constater que leurs applications se multiplient sur les ordinateurs et les téléphones. Les publications qui en découlent, perçues par les utilisateurs comme des occasions de confier à tout le monde ses histoires de cul par exemple, donnent aussi des indications sur les pratiques et les choix des consommateurs. Let's ShopTogether ! Comptons jusqu'à trois et rejoignez-nous tous et toutes dans le merveilleux monde du social shopping !

La tendance n'est pas prête de s'inverser, les chiffres jouent en leur faveur. Selon une estimation maison moulée à la louche, d'1 à 2 écrans de télévision par foyers dans les années 90, nous sommes passés aujourd'hui à 10 écrans permettant de générer et récupérer de l'information. Outre le temps passé dessus, c'est l'exposition à la lecture des autres qui est devenue un comportement addictif. Ça tombe bien les écrans nomades servent aussi à ça. Qu'attendez-vous pour filer chez Gap nous dire en direct comment tombe le jean 1969 en coton bio ?

C'est dans cette belle ambiance délétère qui mélange soupçon permanent et exposition volontaire que nous en sommes à regretter nos chères années 90. La TV ne nous permettait pas réellement de nous mettre en avant, mais au moins l'atteinte aux libertés individuelles n'avait pas droit de cité en raison du manque d'interactivité du support. De toutes façons, vous avez quelque chose à cacher vous en dehors de la photo où on vous voit nu à l'âge de 2 mois dans votre baignoire bleue en plastique et que votre mère passe son temps à montrer à ses amies depuis des lustres ? Heureusement le vendeur de chez Kodak n'est pas mal intentionné, lui...

Déjà publié :

1. Tout savoir et tout oublier ? Merci Internet...

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