mardi 6 octobre 2009

Le microblogging à la conquête du vide ?


La communication internet est en pleine mutation, qu'on se le dise. Le boom généré par les outils et sites de réseautage social (Twitter, Jaiku, Frazr, Bloggino, Zuosa...) ont généré de nouvelles techniques de communication, dont une qui va nous intéresser plus particulièrement dans cet article : le microblogging (ou miniblogging). En effet, depuis quelques années, de plus en plus d'adeptes se sont pris au jeu du "partage de la pensée réduite" parallèlement au développement d'outils de mise en relation "online".

Qu'est-ce que le microblogging ?

Techniquement, le microblogging, c'est simple. Un champ de texte contenant de 140 à 200 caractères (ce qui est peu finalement) et permettant de publier du contenu web de façon immédiate. Ensuite 2 approches : soit les outils de partage se chargent de faire passer l'info aux réseaux (statuts, social networking, flux RSS, liens...), soit les informations sont générées comme des actualités en vrac par l'hébergeur de l'information et tendent à pouvoir devenir accessibles à des personnes hors réseaux. Au final le but ultime et grisant étant de voir un maximum de commentaires à son microblog.

Comment en est-on arrivé là ?

Plusieurs paramètres sont à mettre en exergue pour expliquer cela :

Tout d'abord la communication mobile. Elle est la première justification au microblogging. Cela fait quelques années que nous avons appris à réduire notre pensée à l'écrit (en inventant même un vocabulaire abrégé spécifique que certains manient mieux que la langue française écrite) pour envoyer par exemple des SMS. Nous savons donc faire cela...les acteurs de la mobilité l'ont bien compris en intégrant du coup des applications de microblogging à leurs appareils, et on peut dire qu'ils ne sont pas trompés puisque cela semble aller dans le sens de la demande.

Ensuite l'explosion du blogging depuis 2004. Il y aurait en 2009 150 millions de blogs dans le monde, ce qui est considérable. Face à cette tendance à blogger à tout va, les réseaux sociaux ont bien compris aussi qu'il y avait un créneau à prendre. Ils ont donc développé une série d'outils permettant de blogger à un moindre niveau. Le meilleur exemple est le site facebook, qui n'avait pas vocation au microblogging à sa création, mais qui depuis est dans la recherche permanente du microblogging via la mise en avant des statuts de ses utilisateurs, et leur facilité à être commentés. Facebook se positionne donc désormais comme un concurrent sérieux de Twitter, tout du moins sur cet aspect là.

Une autre raison qui peut expliquer l'essor du microblogging, c'est le comportement "No Life" que tout microblogger potentiel(lement) peut avoir en lui : dire où l'on se trouve, raconter sa vie, essayer de faire de l'humour, surprendre, choquer, être à la page sur l'actualité ou même s'inventer une vie. Le tout en partant du postulat que cela peut intéresser les contacts de son propre réseau, voire dans certains cas même en conquérir de nouveaux grace à la qualité de ses publications. Mais ce comportement "No Life" peut aussi se coupler à un comportement de fan poussé à l'extrême : suivre les parutions de ses héros en temps réel est pour certains une obsession.

Enfin la dernière raison est l'utilisation du microblogging comme outil professionnel. Certaines professions peuvent justifier la publication permanente d'informations pour donner l'impression que le lecteur est un peu comme quelqu'un qui serait relié aux publications de l'AFP du matin au soir. C'est le cas du journalisme, de la politique, de la recherche, de la culture... mais cela intéresse aussi de plus en plus les entreprises et leurs cellules marketing qui y voient déjà un moyen de fidéliser et de toucher de nouvelles cibles en communiquant auprès de leurs prospects ou clients en temps réel.

Quelles sont les dérives du microblogging ?

Plusieurs dérives du microblogging ont été identifiées. En effet, si elle paraît de plus en plus indispensable en tant que "nouvel ordre de communication", on peut quant même trouver cette pratique un peu facile et l'accuser d'être un frein à l'affirmation de la pensée.

Tout d'abord, il y a fort à parier que le microblogging va se substituer très rapidement au blogging. C'est même déjà en marche : combien de blogs sur internet sont-ils encore réellement tenus à jour ? difficile à dire mais beaucoup d'entre eux ressemblent désormais à des blogs fantôme encore bien référencés. De plus, parmi ceux qui continuent à publier des articles, de moins en moins voient passer de commentaires de lecteurs, ce qui peut laisser penser que les articles sont peu lus. Mauvaise nouvelle pour la pensée et l'argumentation qui l'accompagne sur ces formats (car c'est quant même plus facile quant on a de la place pour le faire).

Ensuite, une certaine addiction à cette pratique a été constatée. Les statuts perso sont devenus quasiment des "battles" pour raconter sa vie ou ses états d'âme. On peut voir que certaines personnes ne tiennent pas plus de 10 minutes sans publier quelque chose. Il devient difficile dans ce cas là d'appeler encore cela du microblogging, surtout en conservant le mot "blogging". Mais ça peut aller encore plus loin avec l'addiction aux statuts des autres : se ruer sur leurs publications est devenu une activité qui peut prendre pas mal de temps sur facebook, tout comme être le lecteur asservi de sa star favorite sur Twitter. Et là les commentaires pleuvent...

Enfin d'un point de vue professionnel, il est quant même assez scandaleux que par exemple des journalistes en train de suivre un procès d'envergure acceptent de passer la majorité de leur temps au tribunal à commenter en temps réel sur internet en 140 caractères ce qu'ils voient, comme si l'observation du tableau d'un procès devenait plus importante que son contenu. Il serait quant même préférable que les journalistes ne deviennent pas uniquement que des observateurs, mais plutôt qu'ils restent des rédacteurs dans les règles de l'art afin de continuer à représenter des modèles auprès de nous, lecteurs, qui n'utilisons pas plus de 12% des capacités de notre cerveau au quotidien. Tirez-nous vers le haut !!!

Alors on microblogue ou pas ?

Oui nous pouvons microblogger, bien sûr. Nous le faisons déjà presque tous. Mais entre l'addiction et l'incitation égocentrique à être lu, il faut essayer de trouver une fonction au microblogging : teaser un travail rédactionnel plus conséquent, communiquer avec les autres rapidement et quasi gratuitement, ou mettre en avant de l'info qui parfois ne justifie pas plus de place...et surtout éviter le piège consistant à vivre au travers du microblogging comme un moyen de communication exclusif et suffisant de notre temps. On peut même s'interroger sur l'avenir de cette pratique : il ne faudra peut-être pas s'étonner de voir très prochainement des enfants en bas âge communiquer entre eux avec des pâtes alphabet pour se faire passer des messages du type " la nourrice pue du bec" ou " j'ai envie de jeter mon petit pot par la fenêtre".

Gloups.


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